L'autisme au quotidien : des particularités de fonctionnement

Infographie du cabinet Psychobayes présentant les particularités de fonctionnement chez les personnes autistes (TSA) dans trois grands domaines : le domaine social, les comportements et intérêts restreints et répétitifs, les aspects sensoriels

Source de l’infographie : cabinet PsychoBayes. Pour découvrir l’ensemble des fiches créées par Eline et Kally pour sensibiliser le plus largement possible aux troubles neurodéveloppementaux, n’hésitez pas à vous rendre sur leur page Instagram : instagram.com/psychobayes

Infographie TSA : "tu te reconnais ? mes routines, mes rituels me rassurent / Je me sens en décalage avec les autres / Je n'aime pas le changement / Je n'aime pas les imprévus / Faire un choix, difficile voir impossible pour moi / ...
Vous trouverez ci-dessous certaines particularités de fonctionnement que nous avons souhaité détailler davantage.

Autisme et traitement sensoriel

Les troubles de la modulation sensorielle (TMS) sont des anomalies de la perception sensorielle couramment observées chez les personnes autistes. C’est un sujet complexe et varié qui nécessite une attention particulière.

Les TMS se réfèrent à des difficultés à réguler et à organiser les informations sensorielles provenant de l’environnement. Le cerveau a des difficultés à traiter l’information sensorielle provenant des différents sens. Cela peut inclure une hypersensibilité (réaction excessive) ou une hyposensibilité (réaction insuffisante) aux stimuli sensoriels. Chez certaines personnes autistes, le cerveau ne pourra traiter qu’un sens à la fois.

Nous connaissons habituellement les cinq sens suivants :

  1. La vue : C’est le sens qui permet de percevoir les stimuli lumineux et les formes, les couleurs et les mouvements à travers les yeux.
    • Organe : l’œil
    • Exemples de perception : voir un paysage, distinguer les couleurs, détecter le mouvement.
  2. L’ouïe : C’est le sens qui permet de percevoir les sons grâce aux vibrations des ondes sonores.
    • Organe : l’oreille
    • Exemples de perception : écouter de la musique, entendre une conversation, percevoir un bruit.
  3. L’odorat : C’est le sens qui permet de percevoir les odeurs par l’intermédiaire des récepteurs olfactifs situés dans le nez.
    • Organe : le nez
    • Exemples de perception : sentir une fleur, détecter une odeur de fumée, apprécier l’arôme d’un plat.
  4. Le goût : C’est le sens qui permet de percevoir les saveurs à travers les papilles gustatives situées sur la langue.
    • Organe : la langue
    • Exemples de perception : goûter un aliment, distinguer le sucré, le salé, l’amer, l’acide.
  5. Le toucher : C’est le sens qui permet de percevoir les sensations de contact, de pression, de température et de douleur par la peau et les autres tissus corporels.
    • Organe : la peau
    • Exemples de perception : sentir la texture d’un objet, ressentir la chaleur ou le froid, ressentir une caresse, percevoir la douleur d’une piqûre.

Il existe aussi deux sens supplémentaires qui sont souvent méconnus :

  1. La proprioception : C’est le sens qui permet de percevoir la position et le mouvement des différentes parties du corps.
    • Organe : récepteurs sensoriels dans les muscles, les tendons et les articulations
    • Exemples de perception : savoir où se trouvent ses bras et ses jambes sans les regarder, coordonner les mouvements.
  2. L’équilibre (ou sens vestibulaire) : C’est le sens qui permet de maintenir l’équilibre et de percevoir les mouvements de la tête et du corps.
    • Organe : l’oreille interne (labyrinthe vestibulaire)
    • Exemples de perception : maintenir son équilibre en marchant, percevoir la rotation de la tête.
    • Hypersensibilité : Les personnes peuvent trouver certains sons, lumières, textures ou goûts extrêmement désagréables ou douloureux. Par exemple, un bruit de fond que d’autres peuvent ignorer pourrait être insupportable pour une personne autiste.
    • Hyposensibilité : Certaines personnes peuvent avoir besoin de stimulations intenses pour ressentir une réponse sensorielle. Par exemple, elles peuvent ne pas sentir la douleur aussi intensément ou peuvent rechercher des sensations fortes.
    • Réactivité paradoxale : Certaines personnes peuvent également présenter des particularités sensorielles encore plus atypiques avec des réactivités paradoxales, c’est-à-dire que sur un même canal (sens), elles peuvent être parfois en hyposensibilité et parfois en hypersensibilité, cela pouvant fluctuer d’une minute à l’autre. Par exemple, elles peuvent ne pas réagir à une sauce pimentée extrêmement forte en début de repas et se retrouver avec la langue en feu lorsqu’elles en reprennent en fin de repas. De même, un bruit va être insupportable un jour et le lendemain, dans les mêmes conditions, elles rechercheront un environnement encore plus bruyant.
    • Les TMS peuvent affecter les activités quotidiennes, comme manger, s’habiller, se concentrer à l’école ou au travail, participer à des interactions sociales. Par exemple, une personne hypersensible aux textures peut refuser certains types de vêtements ou aliments.
    • En cas d’hyposensibilité, la personne peut se mettre en danger car elle ne ressent pas la sensation (brûlure, douleur,…) voire même elle la recherche fortement. Au contraire, en cas d’hypersensibilité, la personne peut mettre en place une stratégie d’évitement : refus de porter certains types de vêtements, refus de manger certains aliments, refus d’aller dans des endroits bruyants tels que le cinéma, les restaurants ou les magasins, etc. Les comportements d’évitement peuvent isoler davantage la personne autiste.
    • Les TMS peuvent être une source de stress et d’anxiété extrêmement importante. Cela est encore plus prononcé chez les personnes souffrant d’une réactivité paradoxale dans la mesure où quelle que soit la situation, elles ne peuvent jamais anticiper la façon dont leur corps peut réagir.
Le profil sensoriel de DUNN va être utilisé pour évaluer le profil sensoriel. Il est généralement réalisé par un psychomotricien ou un ergothérapeute. Certains éducateurs spécialisés peuvent également être formés pour faire passer ce test.
    • Interventions sensorielles : Utiliser des techniques d’intégration neuro-sensorielle, souvent guidées par un psychomotricien ou un ergothérapeute, peut aider à mieux gérer les TMS. Cela peut inclure des activités spécifiques visant à améliorer la tolérance sensorielle. Si on se réfère à la pyramide des apprentissages de William & Schellenberger, l’intégration sensorielle constitue la base de la pyramide des apprentissages de l’enfant et doit donc être traitée en priorité (cf. Pyramide des apprentissages dans les ressources documentaires)
    • Adaptations environnementales : Modifier l’environnement pour réduire les stimuli sensoriels négatifs, comme utiliser des lumières douces, des casques anti-bruit, ou des vêtements sans étiquettes, peut aider à rendre l’environnement plus confortable.
conseil

Les difficultés de traitement de l’information sensorielle sont une source importante de comportements dits « problèmes » ou « comportements défis » : agressivité, automutilation, etc. Il est crucial que les parents, les éducateurs et les professionnels de la santé reconnaissent les TMS chez les personnes autistes pour mieux comprendre leurs comportements et leurs besoins. Une compréhension et une reconnaissance appropriées permettent de mieux adapter les interventions et de créer des environnements plus inclusifs et tolérants, et d’améliorer ainsi la qualité de vie des personnes autistes.

Autisme et traitement de l’information

Le traitement de l’information au niveau du cerveau est un processus dynamique et complexe impliquant la réception, la transmission, le traitement, l’intégration, l’interprétation et la réponse aux stimuli sensoriels et cognitifs de l’environnement. C’est ce processus qui va nous permettre de percevoir le monde qui nous entoure, de comprendre les situations et de pouvoir ainsi prendre des décisions et agir de manière adaptée.

Le processus de le l'information par le cerveau : réception des stimuli par les organes sensoriels, transmission des signaux jusqu'aux régions cérébrales concernées, traitement des informations sensorielles et cognitives par les différentes zones du cerveau dédiées puis interprétation de leur signification et génération des réponses appropriées

Chez les personnes autistes, le délai de traitement de l’information peut-être très allongé !

Les raisons sont multiples et les recherches se poursuivent. En voici quelques-unes :

Au niveau de la réception des stimuli, plusieurs particularités peuvent notamment être mises en évidence pour expliquer ce délai de traitement allongé :

  • les personnes autistes perçoivent l’ensemble des stimuli de leur environnement sans aucun filtre. Les stimuli sont donc tous traités au même niveau, sans hiérarchisation, sans tri préalable . A titre d’exemple, cette difficulté ou incapacité à filtrer les sons fera que le bruit du stylo qui tombe sera traité au même niveau que la voix du professeur qui parle.
  • selon le profil sensoriel de l’individu, les signaux en provenance des canaux sensoriels peuvent être atténués ou au contraire amplifiés.
  • du fait d’une vision souvent plus focale, les personnes autistes vont voir le détail avant de voir l’ensemble.

Au niveau du traitement et de l’intégration des informations :

  • la difficulté à trier les informations de premier plan et d’arrière-plan génère une masse d’informations à traiter par le cerveau qui ne peut pas toutes les traiter simultanément, d’autant plus que les personnes autistes ont un traitement de l’information unimodal : leur cerveau est incapable de traiter simultanément des stimuli mobilisant des canaux sensoriels différents. Les informations sont donc traitées une à la fois au détriment de la signification de l’ensemble et du contexte. Combiner l’ensemble des informations traitées demande beaucoup d’entrainement et d’énergie à une personne autiste et nécessite un niveau de fonctionnement plus élevé.
Selon des études scientifiques par imagerie cérébrale, pour une même tâche, les zones du cerveau utilisées par les personnes autistes et les personnes non autistes sont différentes.
conseil

Afin de tenir compte de ces différences dans le traitement de l’information, lorsqu’on pose une question ou qu’on donne une consigne à une personne autiste, il est essentiel de lui laisser le temps nécessaire pour traiter l’information et nous répondre en conséquence.
Parler à la personne pendant qu’elle traite l’information, répéter ou reformuler sera contre-productif : en apportant de nouveaux stimuli, le traitement en cours va être parasité voire interrompu et le processus d’analyse devra être repris à zéro comme s’il s’agissait d’une nouvelle consigne.
Selon les cas, il peut arriver que la réponse ne vienne que 15 à 20 mn après avoir posé la question.

Autisme et dysfonctionnement des fonctions exécutives

Les fonctions exécutives sont un ensemble de processus cognitifs nécessaires pour le contrôle et la régulation des comportements. Elles sont souvent comparées à un chef d’orchestre.

Les fonctions exécutives permettent :

  • d’avoir un comportement flexible et adapté à un contexte donné
  • de se mobiliser pour atteindre un but

Les recherches ont en effet montré un dysfonctionnement des fonctions exécutives chez les personnes autistes, qui explique notamment la rigidité et les rituels importants, la difficulté à gérer les imprévus et à gérer les émotions, etc.

Les fonctions exécutives :

  • L’activation : Elle permet de mobiliser l’énergie, l’attention et les ressources nécessaires pour commencer une tâche ou un comportement attendu, et maintenir l’action : saisir le problème, s’engager dans la tâche, maintenir l’énergie et l’effort dans le temps.
  • L’inhibition ou la régulation de l’impulsivité comportementale et cognitive : Difficulté à inhiber des réponses impulsives ou inappropriées. L’inhibition contrôle l’impulsivité. Elle est la première et la plus importante étape de l’autocontrôle. C’est le chef d’orchestre des autres fonctions exécutives. On doit pouvoir contrôler son activité physique, réfléchir avant d’agir, s’autosurveiller pour éviter les pièges cognitifs, contrôler les réponses automatisées, rester attentif en résistant aux distractions.
  • Flexibilité cognitive : Difficulté à s’adapter à des changements ou à passer d’une tâche à une autre. La flexibilité cognitive permet la souplesse et l’ouverture d’esprit. Elle permet l’adaptation aux exigences des différentes tâches, et aux situations nouvelles.
  • Planification et organisation : Problèmes à structurer les tâches et à respecter les délais. L’organisation est la capacité à classer des informations, et la planification est un mécanisme établissant un but ainsi que des actes nécessaires pour y arriver. Savoir d’où on part pour savoir où on va, gérer le temps, mettre les connaissances en ordre.
  • Mémoire de travail : Difficulté à maintenir l’information nécessaire pour accomplir des tâches. La mémoire de travail fait appel à la rétention de l’information, à sa transformation et à sa manipulation. C’est l’administrateur central, le pont entre l’entrée sensorielle et la mémoire à long terme. Elle sert à se répéter, visualiser et traiter l’information.
  • Régulation des émotions : Problèmes à nommer, comprendre, nuancer et gérer les émotions, entraînant des réactions excessives. La régulation des émotions consiste en un processus d’évaluation, d’autosurveillance et de modification des réactions émotionnelles dans le but de réaliser ses objectifs.
Les fonctions exécutives : activation, inhibition, planification, mémoire de travail, régulation des émotions

Autisme et alimentation

statistiques

Selon les études :

  • Entre 70% et 80% des personnes autistes auraient des troubles de l’alimentation
  • Seuls 20% à 30% de ces enfants conserveraient ces troubles à l’âge adulte

Les personnes autistes peuvent présenter des troubles de l’alimentation pouvant aller jusqu’à une hypersélectivité alimentaire extrêmement importante rendant impossible la mise en place d’une alimentation équilibrée et variée.

Les conséquences sont doubles :

  • en termes de santé avec un risque de carences nutritionnelles, de constipation chronique, etc. ;
  • en termes social avec l’impossibilité de participer à des repas de famille, sorties ou autre. La gestion des repas peut-être également un vrai casse-tête pour les parents et être générateur de stress et d’épuisement.

Pour la personne autiste elle-même, les repas peuvent être un moment particulièrement angoissant et elle pourra avoir tendance à refuser de manger ou à s’isoler pour les repas.

Les causes des troubles alimentaires peuvent être multiples et complexes :

  • particularités sensorielles telles qu’une hypersensibilité aux textures, aux goûts, aux odeurs ou à la couleur des aliments,
  • difficultés de mastication ou de déglutition notamment en lien avec une hypotonie (baisse du tonus musculaire qui peut toucher les muscles de la bouche et de la langue),
  • difficultés de généralisation qui peuvent limiter la capacité à manger un même aliment sous des formes différentes ou dans des contextes différents (une tomate cuite et une tomate crue seront considérés comme deux aliments différents,
  • routines rigides ou intolérance au changement qui peuvent rendre l’introduction de nouveaux aliments ou le changement d’habitude alimentaire difficile,
  • médicales (reflux gastro-oesophagien, constipation, allergies alimentaires, etc.),
  • expérience négative dans le passé : une fausse route, un réflexe nauséeux, une intoxication alimentaire ou même un mauvais souvenir associé à un aliment ou à son odeur peuvent créer un rejet définitif de l’aliment,

A noter que le pica, trouble alimentaire qui consiste à ingérer des aliments non comestibles (terre, papier, craie, cheveux, cailloux, objets…), est plus fréquent chez les personnes autistes que dans la population générale. La prévalence de ce comportement serait plus élevée chez les personnes autistes avec  déficience intellectuelle.

L’intensité des troubles est variable selon les personnes. Ils peuvent être passagers comme persistants et peuvent arriver à tout âge. Il ne s’agit en aucun cas d’un caprice de l’enfant et le forcer peut-être contre-productif. Si les troubles alimentaires deviennent inquiétants, il est important de se rapprocher des professionnels de santé : médecin traitant et orthophoniste et/ou un ergothérapeute formés dans ce domaine.

conseil

Il ne s’agit en aucun cas d’un caprice de l’enfant et le forcer peut-être contre-productif. Si les troubles alimentaires deviennent inquiétants, il est important de se rapprocher des professionnels de santé : médecin traitant et orthophoniste et/ou un ergothérapeute formés dans ce domaine.

Autisme et sommeil

Retrouvez une échelle de dépistage des troubles du sommeil de l’enfant de 4 à 16 ans sur le site de autismeetsommeil.fr

ressources documentaires
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